Wegener a théorisé une dérive des continents en 1912.
I. La représentation de Suess
Fin XIXe, début XXe siècle, la communauté scientifique s’allie plutôt à la représentation d’Eduard Suess qui est la suivante. On suppose que la Terre est une matière en fusion qui refroidit, et en refroidissant elle se rétracte. Elle se ride, un peu comme une pomme, et ces rides induisent des phénomènes de mobilité verticale avec des creux et des bosses. Les creux seraient occupés par de l’eau (les mers) et les bosses seraient occupées par des montagnes. Donc, à l’époque de Suess (début XXe siècle), les scientifiques s’accordent pour dire qu’il y a effectivement des mouvements verticaux. Quant aux mouvements horizontaux, on les associe à des plissements près des montagnes mais ils ne sont pas trop théorisés. On pense vraiment à un refroidissement, une diminution du volume et donc l’apparition de creux et bosses.
II. La théorie de Wegener
Wegener trouve plusieurs arguments et se place plutôt dans le mobilisme. Il veut démontrer qu’il y a beaucoup de mouvements horizontaux. Les mouvements verticaux font l’unanimité mais les mouvements horizontaux, non. Pour cela, il évoque plusieurs arguments qui sautent aux yeux qu’on montre dans le schéma suivant.
On reconnaît l’Afrique et l’Amérique du Sud. Un des arguments phares de Wegener est la concordance des côtes entre l’Amérique du Sud et l’Afrique. Il voyage beaucoup et était météorologue, entre autres, ce qui est aussi une chose assez originale : ce scientifique était pluridisciplinaire. Il met en évidence que certains fossiles (les indices paléontologiques qu’on retrouve en Afrique et en Amérique latine) sont datés du même âge. Il est peu probable que le fossile ait traversé tout l’Atlantique. Donc, l’Afrique et l’Amérique du Sud ont été à un moment donné un même continent. Il y a énormément d’arguments pétrographiques.
Il y a aussi un argument de traces d’ancien glacier que l’on a au Sud de l’Afrique et qui correspondent à une zone côtière de l’Amérique du Sud. Il y a donc toute une panoplie d’arguments pour dire que les continents ont dérivé. Ils ne formaient qu’un seul continent : la Pangée, et ont dérivé.
Un autre argument qu’on étudie s’appelle la distribution bimodale des altitudes. Cela peut paraître surprenant comme argument de dérive et de mouvement horizontal. L’idée de Wegener était de regarder l’homogénéité ou l’hétérogénéité des altitudes aussi bien sur le continent que la batimétrie au niveau des océans. À la fin du XIXe siècle, il y a beaucoup de câblages entre le Royaume-Uni et l’Amérique du Nord. On pose des câbles télégraphiques, ce qui permet d’avoir des données sur la profondeur des océans. Avec toutes ces données, Wegener se rend compte que théoriquement, si la surface de la Terre (selon le modèle d’E. Suess) était homogène, on devrait avoir des creux et des bosses un peu partout : aussi bien sur les continents que dans les océans. Quand on récupère les données de batimétrie et quand on regarde la topographie des reliefs continentaux, on se rend compte qu’il y a une distribution non pas gaussienne (unimodale) mais bimodale.
Autrement dit, les continents ont des altitudes plutôt élevées (moyenne supérieure à 1 000 m) et les océans ont des profondeurs moyennes d’environ 4 700 m (-4700m). L’idée étant que puisque les continents ont des altitudes plutôt élevées et les océans des profondeurs assez importantes, il suppose que les continents ont des densités faibles et dérivent (d’où la dérive des continents) sur un support plus dense.
Pour terminer, il propose une représentation de la Terre. Pour évoquer la dérive de l’Afrique et de l’Amérique, il a nommé Sial pour Silicium et Aluminium (éléments chimiques de faible densité composant la majorité de la croute continentale) les plaques qui dériveraient sur quelque chose de plus dense : le Sima (Silicium-Magnésium, beaucoup plus dense). Cette représentation est fausse, mais l’idée révolutionnaire de Wegener était surtout de démontrer que les continents sont mobiles. Les plaques lithosphériques aussi bien continentales qu'océaniques sont mobiles. Son idée était qu’il y avait une mobilité à la surface du globe terrestre et non un fixisme que défendait pas exemple Eduard Suess.