Troisième > Mission Brevet Français > Mes sujets de brevet > Dénoncer les travers de la société
Cet extrait se situe au tout début de la nouvelle. Le titre, composé de deux termes anglais (« wood » : le bois et « town » : la ville), signifie « La ville en bois ».
L'emplacement était superbe pour bâtir une ville. Il n'y avait qu'à déblayer les bords du fleuve, en abattant une partie de la forêt, de l'immense forêt vierge enracinée là depuis la naissance du monde. Alors abritée tout autour par des collines, la ville descendrait jusqu'aux quais d'un port magnifique, établi dans l'embouchure de la Rivière-Rouge, à quatre milles seulement de la mer.
Dès que le gouvernement de Washington eut accordé la concession, charpentiers et bûcherons se mirent à l'œuvre ; mais vous n'avez jamais vu une forêt pareille. Cramponnée au sol de toutes ses lianes, de toutes ses racines, quand on l'abattait par un bout elle repoussait d'un autre, se rajeunissait de ses blessures, et chaque coup de hache faisait sortir des bourgeons verts. Les rues, les places de la ville à peine tracées étaient envahies par la végétation. Les murailles grandissaient moins vite que les arbres et, sitôt élevées, croulaient sous l'effort des racines toujours vivantes.
Pour arriver à bout de cette résistance où s'émoussait le fer des cognées et des haches, on fut obligé de recourir au feu. Jour et nuit une fumée étouffante emplit l'épaisseur des fourrés, pendant que les grands arbres au-dessus flambaient comme des cierges. La forêt essaya de lutter encore, retardant l'incendie avec des flots de sève et la fraîcheur sans air de ses feuillages pressés. Enfin l'hiver arriva. La neige s'abattit comme une seconde mort sur les grands terrains pleins de troncs noircis, de racines consumées. Désormais on pouvait bâtir.
Bientôt une ville immense, toute en bois comme Chicago, s'étendit aux bords de la Rivière-Rouge, avec ses larges rues alignées, numérotées, rayonnant autour des places, sa Bourse, ses halles, ses églises, ses écoles, et tout un attirail maritime de hangars, de douanes, de docks, d'entrepôts, de chantiers de construction pour les navires. La ville de bois, Wood'stown - comme on l'appela, - fut vite peuplée par les essuyeurs de plâtres des villes neuves. Une activité fiévreuse circula dans tous ses quartiers ; mais sur les collines environnantes, dominant les rues pleines de foule et le port encombré de vaisseaux, une masse sombre et menaçante s'étalait en demi-cercle. C'était la forêt qui regardait.
Elle regardait cette ville insolente qui lui avait pris sa place au bord du fleuve, et trois mille arbres gigantesques. Tout Wood'stown était fait avec sa vie à elle.
7. Lignes 30-31 : « Elle regardait cette ville insolente qui lui avait pris sa place au bord du fleuve, et trois mille arbres gigantesques. »
a) Relevez les verbes de cette phrase. Indiquez le temps de chacun.
b) Précisez la valeur de chacun de ces temps.
8. Lignes 15-16 : « Jour et nuit une fumée étouffante emplit l’épaisseur des fourrés [...] »
a) Quelle est la fonction du groupe de mots souligné ?
b) Justifiez votre réponse en précisant la manipulation que vous avez utilisée.
9. Ligne 1 : « emplacement »
a) Expliquez la formation de ce mot.
b) Indiquez sa nature (classe grammaticale).
c) Donnez deux mots de la même famille.
10. Réécrivez ce passage en conjuguant les verbes au futur de l’indicatif.
« Dès que le gouvernement de Washington eut accordé la concession, charpentiers et bûcherons se mirent à l'œuvre ; mais vous n'avez jamais vu une forêt pareille. Cramponnée au sol de toutes ses lianes, de toutes ses racines, quand on l'abattait par un bout elle repoussait d'un autre, se rajeunissait de ses blessures, et chaque coup de hache faisait sortir des bourgeons verts. Les rues, les places de la ville à peine tracées étaient envahies par la végétation. Les murailles grandissaient moins vite que les arbres et, sitôt élevées, croulaient sous l'effort des racines toujours vivantes. »